dimanche 27 mai 2012

Life and Art of David Fincher: juste un jeu...



Suivant Se7en, Fincher est auréolé de gloire et s'empare rapidement d'un nouveau film pour profiter de son moment. Il a deux projets en route, le premier est The Game, un nouveau thriller. Le second est un gros produit, qui va nécessité du temps, l'adaptation d'un roman sur des club de boxe clandestins et un projectionniste anarchiste...


The Game est produit par Polygram, qui possède Propaganda qui a récupéré le projet à la MGM et qui semblait décidé à en faire l'un de ses grands films de lancement. Hélas, la malédiction a pesé lourd sur le succès du film. La première a lieu au même moment où la princesse Diana meurt et les photographes boudent la promo. Le film est mal-aimé, même si la critique est dans l'ensemble tolérante. Le film sort timidement et sera un échec lourd pour les producteurs. Polygram ne survivra d'ailleurs pas longtemps à ces bides à répétition, et coulera en 1999, son catalogue redistribué entre différents studios co-producteurs, notamment et surtout Universal.

Il est aussi le premier film produit par Cean Chaffin, qui deviendra la productrice de tous les films suivant de Fincher et sa compagne dans la vie. C'est, dans une moindre mesure, également la première collaboration de Fincher avec Harris Savides avec lequel Fincher tournera Zodiac et L'étrange histoire de Benjamin Button. On notera également le seconde présence à la musique d'Howard Shore (et sa meilleure BO) pour Fincher.


The Game, c'est l'histoire de Nicholas Von Orton, l'aîné d'une riche famille qui, au jour de son anniversaire, reçoit de son frère, sa seule famille, une carte l'invitant à participer à un jeu. Von Orton, plongé dans une vie de travail et de solitude, dans la grande maison familiale, celle où son père s'est donné la mort et où toute joie a disparu, décide de participer. Mais très vite, le jeu de rôle s'empare de sa vie et l'amène à la ruine.



L'amour de Fincher pour l'Arnaque de George Roy Hill a sans doute joué dans sa décision de mettre en scène le film, un jeu pour le metteur en scène, qui dirige, comme la CRS, la destinée du héros et la vision qu'en a le spectateur. Une réflexion ludique sur le cinéma, comme ont pu l'observer un grand nombre de critique, où qu'est-ce que le jeu de CRS sinon un film dont nous sommes les héros, au budget Hollywoodien et donc réservé à l'élite de la société, où l'on s'amuse à briser un à un les tabous, le carcan de la vie du héros pour qu'il redevienne humain.


Mais ce qui fascine dans The Game, c'est le rôle du père de Von Orton. Le choix de débuter le film avec un vieux film de famille n'est pas un hasard. Au delà de l'aspect ludique, il s'agit d'une dépossession, ou comment Von Orton doit tuer le fantôme de son père pour être lui. Les images du générique, Von Orton en costume à l'ombre de son père, portant dans ses bras son jeune frère, prédestine le héros à épouser une destinée de responsabilité. Le scénario appuie la logique, alors que Von Orton a atteint l'âge où son ère s'est suicidé. Mais c'est la mise en scène de Fincher qui en fait un élément plus intéressant, en jouant plus encore la carte de l'emprise, quand on découvre par des photos, des récits, le passé du héros, la prise progressive de pouvoir du père sur son enfant, pour le pousser à refaire le geste, Fincher n'omettant pas, dans le suicide de Von Orton, de caler deux images fortes, clés, Von Orton portant son frère et vivant dans l'ombre de son père. Le résurrection du héros, chancellant, pleurant, comme un nouveau né, joue de ce même principe.


Pour beaucoup, The Game est une anecdote, le moins bon film du réalisateur, le limitant à son statut de thriller, quand il est bien plus. The Game fut certes pour Fincher une aventure ludique, un film qu'il n'a pas porté comme d'autres mais qui conserve les traces de ses préoccupations: la paternité, la quête identitaire, l'oppression urbaine, le jeu, la manipulation cinématographique...On y retrouve son incroyable souci du détail et la base d'un personnage seul, isolé face à ses tourments intérieurs, des éléments qu'on retrouvera dans la seconde partie de la carrière de Fincher. On pourrait même arguer qu'il sert parfaitement de transition entre le thriller Se7en et l'inclassable objet cinématographique qu'il allait livrer ensuite, Fight Club, qui allait tout foutre par terre.




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